8. Les étymons de la racine chamito-sémito-indo-européenne

Les ouvrages publiés en 2014 (« La racine chamito-sémito-indo-européenne ») et en 2015 (« La préfixation en « s- » de la racine chamito-sémito-indo-européenne ») montrent que les lexiques de plusieurs langues des familles linguistiques chamito-sémitique et indo-européenne (i.-e.) ont été, en dépit de leur diversité, construits selon une méthode unique : l’assemblage d’éléments biconsonantiques (« étymons »), associant toute consonne à la consonne occlusive glottale (« coup de glotte »), notée « 3 » en égyptien hiéroglyphique (é.-h.), et représentée par un « vautour ». Ce phonème « 3 » se transpose quasiment comme la voyelle qu’il porte (avec ou sans aménagement), aussi bien en sémitique (voyelle longue ou brève) qu’en i.-e. (voyelle toujours brève).

La racine triconsonantique sémitique (trois étymons), et la grande majorité des racines i.-e. (deux étymons avec affixes ou élargissements) sont donc construites comme la plus grande partie des radicaux é.-h. (deux ou trois étymons). Les consonnes é.-h. (apparues très tôt, et dont l’origine reste inconnue) pourraient reprendre des phonèmes très antérieurs, initialement dotés d’une signification propre (motivation phonémique), en raison des facultés d’inversion des étymons et de leur interversion dans les radicaux, sans changement de sens (« 3 » est le seul phonème de double sens : « ôter, déchirer » et « tenir »). Ces phonèmes signifiants définissent un système de « codification » adapté aux groupements primitifs errants : certains phonèmes voisés (mettant en jeu les vibrations des cordes vocales) évoquent une allure de déplacement plus lourde (et donc plus lente) que les non voisés. « 3 » et les 23 autres phonèmes créent 46 étymons morphologiques (d’où les nombreux radicaux homophones é.-h.), opérant sur 18 « secteurs sémantiques » (selon les deux sens de « 3 »), ce qui produit 828 étymons sémantiques théoriques.

L’occlusive glottale « 3 » correspond aux deux fricatives glottales (voisée « H » et non voisée « h »), et, en tête d’étymon, génère (ou non) – outre la voyelle qu’elle porte – l’esprit rude grec (aspiration aléatoire) ou la hamza arabe. La double expression de l’aspiration aléatoire grecque (type « g » ou type « w ») indique que « H » est corrélée avec « g » et « w » (ainsi que d’autres consonnes voisées). L’analyse linguistique actuelle i.-e. expliquant certains radicaux par la présence d’une « labiovélaire » de type *gw, il est possible de les reconstruire par des étymons dont la consonne (autre que « 3 ») est « H », se réalisant comme toute consonne voisée qui lui est corrélée (labiale ou vélaire) : le sens de ces étymons se précise en fonction de la charge sémantique de la consonne voisée concernée (allure lente). En sémitique, les fréquentes alternances également constatées entre « H » et plusieurs consonnes voisées accréditent une corrélation similaire. Symétriquement, « h » est corrélée avec d’autres consonnes non voisées (labiales ou vélaires). L’analyse actuelle i.-e. expliquant d’autres radicaux par une autre « labiovélaire » de type *kw, il est possible de les reconstruire par des étymons dont la consonne est « h », se réalisant comme toute consonne qui lui est corrélée (de même en sémitique, où existe une corrélation similaire).

Il n’est pas indifférent d’utiliser « H » (et les consonnes voisées qui lui correspondent, en évoquant des allures lentes), ou « h » (et les consonnes non voisées qui lui sont corrélées, en représentant des allures rapides) : en effet, la racine chamito-sémito-indo-européenne garde encore, non seulement la trace de l’assemblage des étymons, mais aussi l’empreinte de la « codification » phonétique originelle. Les « signaux vocaux » obligent à reconsidérer le postulat saussurien de l’arbitraire du signe, qui n’apparaît juste qu’en première approximation : la motivation phonémique réduit ainsi la liberté d’utiliser n’importe quel son pour un signifiant.

Dans les deux familles linguistiques chamito-sémitique et indo-européenne, la création lexicale apparaît donc comme issue des mêmes principes originels, même si la grande diversité des moyens de leur mise en oeuvre a finalement produit leurs lexiques tout-à-fait différents.

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