5. Désinences grammaticales – Théorie des laryngales et théorie de la racine

Les désinences grammaticales (verbales et nominales) sont les terminaisons qui situent le verbe, et le nom, dans l’environnement de la phrase, et indiquent leur fonction précise. En grec et en latin, les grammaires traditionnelles présentent plusieurs types de conjugaisons (pour les verbes) et de déclinaisons (pour les noms), qui font apparaître un système très complexe de désinences. L’ensemble des règles exposées, comportant très peu de similitudes entre les deux langues pourtant parentes, donne toutefois une nette impression d’arbitraire ou de conventionnel. Il conduit donc à un questionnement sur l’origine de ces désinences, qu’il est impossible d’attribuer à des onomatopées ou à l’improvisation des locuteurs-créateurs.

Après avoir reconnu, en chamito-sémitique et en indo-européen, le principe de la construction de tous les radicaux par une quarantaine d’étymons signifiants biconsonantiques (comportant toujours l’occlusive glottale notée “3”, équivalant au “alef” chamito-sémitique), opérant sur une vingtaine de secteurs sémantiques, il était naturel d’explorer la construction des désinences par la même méthode. Et, en effet, l’étude montre que, en grec et en latin, toutes les désinences grammaticales sont formées par les mêmes étymons, qui, choisis par les locuteurs-créateurs en fonction de leur sens, peuvent appartenir à des secteurs sémantiques différents (contrairement à ceux des radicaux, relevant du même secteur sémantique que le radical qu’ils composent). Outre la grande harmonisation qu’ils introduisent dans les grammaires traditionnelles, et la mise en évidence de la logique sous-jacente, ils obligent à reconsidérer les principes de la théorie des laryngales et de la théorie de la racine.

La théorie des laryngales s’est développée au début du siècle dernier, après la réflexion de Saussure relative aux alternances vocaliques (qualitatives et quantitatives) en indo-européen (1878). Pour expliquer l’opposition entre voyelle longue et voyelle brève en fin de radical, Saussure crut à l’existence, en proto-indo-européen, de “coefficients sonantiques”, répertoriés par Möller puis Cuny comme des consonnes “laryngales”, et que Kurylowicz pensa retrouver, en 1927, dans un phonème du hittite. Toutefois, l’étude montre qu’une voyelle longue résulte toujours de la fusion de deux “3” (l’un en fin d’étymon, et l’autre au début de l’étymon suivant). Ainsi, partant d’un constat extérieur juste (alternance vocalique qualitative et quantitative), la thèse laryngaliste aboutit à des conclusions fausses, par méconnaissance de la réalité interne (racine, désinence, et surtout jonction entre ces deux parties, rendant précisément trompeuse l’apparence extérieure) : d’une part, la variation de timbre interne découle de la transposition de “3” (en voyelle brève “a”, “e”, “i” ou “o”, en sémitique et en indo-européen), et, d’autre part, c’est la fusion de “3” du dernier étymon radical, et de “3” du premier étymon désinentiel, qui produit l’allongement trompeur de la voyelle en fin de radical.

La théorie de la racine, proposée par Benveniste en 1935, n’est pas, non plus, adaptée. En effet, la structure figée Consonne-Voyelle-Consonne ne convient pas aux racines commençant par une voyelle, alors que le chamito-sémitique présente des exemples de radicaux commençant par “3”, “j” (“y”), et “w”. L’indo-européen a également conservé les traces du même phonème qui a généré le “ayin” chamito-sémitique. Ce modèle CVC est aussi incompatible avec la racine triconsonantique sémitique, qui n’est elle-même qu’un cas particulier, érigé en “norme”, de la racine chamito-sémitique : les étymons biconsonantiques signifiants montrent ainsi l’existence d’un type unique, non figé, de racine chamito-sémito- indo-européenne, en dépit des très grandes différences phonétiques et lexicales constatées.

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